Revenons sur les quartz à inclusions d’hydrocarbures. Ceux trouvés au Pakistan ont attiré l’attention des commerçants depuis quelques années car il donnent de magnifiques figures sous la lampe UV. Cette année des cristaux de ce type ont été trouvés en abondance à Madagascar et ont créé l’évènement. Ils ont été baptisés « quartz luciolle » pour la couleur verte qui apparaît sous lumière noire (autre nom de l’éclairement UV).
Il y a encore de magnifiques halites bleues de Carlsbad (Nouveau Mexique, USA). Les prix restent toujours élevés pour un minéral aussi sensible à l’humidité.
Un retour à la Tucson Fine Mineral Gallery (TFMG) où était exposée l’intéressante collection de minéraux du Mexique assemblée durant plusieurs décennies par Kerith Graeber. Les spécimens sont typiques de l’art de collectionner les minéraux étatsunien : les dimensions sont plutôt faibles (moins de 12cm), l’esthétique est très recherchée, et enfin il y a le respect du critère dit de « Wilber », du nom du collectionneur-marchand qui l’a généralisé : l’absence totale de cassures, de « dings », même minuscules, ceux que l’on surnomme les « nanowilbers ».
Toujours à la TFMG, la rencontre de Frederico Pezzotta (oui celui de la pezottaite), qui après avoir œuvré pour le musée de Milan, a décidé de se consacrer à la récolte de minéraux et à la société MCP (Mineralogical Collection Professionals) qu’il a fondé en 2012 et qui d’année en année a pris une importance considérable dans la restauration de minéraux. Restaurations qui permettent par exemple, de voir dans leur état premier de beaux cristaux de tourmaline de Madagascar, récoltés cassés en de nombreux fragments par Pezzotta et son équipe. Contestées jusque dans les années 2010, les restaurations sont de plus en plus acceptées, même par certains musées, pour les minéraux dont la principale qualité est leur esthétique.
Tucson c’est aussi des parties plus ou moins festives ou studieuses. C’est l’occasion de discuter, se renseigner ou amorcer des négociations. La première est celle de la galerie Granada.
Au Mineral City, plusieurs commerçants ont pris l’habitude d’organiser des « apéritifs » auxquels se sont ajoutées des soirées animées par des orchestres comme celui où jouait Evan Jones, un important marchand spécialisé surtout dans la minéralogie de l’Ouest américain et celle du Mexique. Là aussi ces moments sont l’occasion d’engager ou finaliser des négociations ou bien de glaner quelques informations ou tout simplement…. de se désaltérer d’une bière après une chaude journée!
Outre les parties festives, il y a des dizaines de réunions plus sérieuses : celles des conférences. L’une des plus courues, d’année en année, est celle organisée par Raquel Alonso-Perez, conservatrice de la collection de minéraux de l’université de Harvard. Le sujet de cette année, intitulé « For the people that make Museum Collections » (pour les gens qui font les collections de musée) était axé sur l’acquisition, faite par ce musée, des collections Pinch et Feinglos.
La feinglosite est un rare arséniate de plomb et zinc hydraté, approuvé en 1995, trouvé à Tsumeb (Namibie) tout d’abord puis au Laurion (Grèce). La pinchite est un rarissime oxy-chlorure de mercure, décrit en 1974, trouvé dans le mine de Terlingua (Texas, USA).
William Pinch (1940-2017) et Mark Feinglos (1948-2020), des amis de longue date, ont été des figures emblématique de la collection systématique d’espèce qui a connu un incroyable engouement à partir des années 1970 et qui a commencé à s’atténuer durant les années 1990. Atténuation toute relative : le bruit court que le grand spécimen d’andyroberstite, un arséniate complexe de Tsumeb, d’où ont été prélevés quelques rares lamelles qui ont permis l’établissement de l’espèce en 1997, est possédé par un riche collectionneur qui ne le céderait pas en dessous d’un million de dollars!
Pinch a vendu sa collection au Canadian Museum of Nature d’Ottawa en 1989 pour 3,5 millions de dollar et avait immédiatement après commencé une seconde collection. Proposée à la vente par Pinch quelques années avant son décès, elle ne trouvait pas acquéreur jusqu’à ce que l’université de Harvard s’y intéresse. Ces deux collections sont peu volumineuses et tiennent dans deux meubles à tiroir.
En conclusion, la bourse de Tucson semble avoir pris cette année ces marques de l’après Covid. L’ambiance est chaleureuse, mais loin de l’enthousiasme des années d’avant Covid. Les nouveautés ont été peu nombreuses mais significatives avec les grandes sapphirines, les grandes tourmalines et les quartz à pétrole de Madagascar. Il y a cependant une abondance de spécimens de qualité prêts à satisfaire tout type de collection.... À conditions d’en avoir les moyens car les prix sont largement supérieurs à ceux pratiqués en Europe.
Et pour finir sur autre chose qu’un des magnifiques couchers de soleil de l’Arizona, je vous propose une photo d’une des formations nuageuses étranges que l’on peut voir dans le ciel de Tucson.
See you next year and take care !!!