In memoriam
L’annonce du décès de Maurice Eyraud, le samedi 19 juin au soir, a endeuillé la foire de Sainte-Marie. Durant des décennies, Maurice en a été un promoteur et un acteur.
Cette année encore le stand de son entreprise, Minerama, situé à l’entrée du théâtre, était l’un des plus importants. Rappelons, que les activités de grossiste en minéraux, n’ont pas altéré le goût de Maurice pour les spécimens remarquables et/ou rares. Certaines pyromorphites des Farges, rhodonites de Chiurucu, elbaites de Pederneira, fluorites et plumbogummites de Chine qu’il a rapportées, ornent les plus prestigieux musées et collections.
En avant-première : La vente d’une importante collection
L’événement majeur de la minéralogie française, de ce mois de juin 2016, a été la vente d’une partie de la collection d’Alexandre Delerm, le vendredi 17 juin. Cette collection était constituée de minéraux du monde entier avec quelques points forts sur le Québec, les Alpes, La France, la Chine et le Mali. La vente d’une collection de ce niveau est quasiment une première en France. L’ambiance a été pourtant assez morose, malgré des estimations plutôt attrayantes. Beaucoup de lots n’ont pas été acquis.
Une bourse aux multiples facettes
Sainte-Marie est un rendez-vous important pour les grands commerçants américains et internationaux. Ils sont présents très tôt et les transactions vont bon train avant même l’installation des stands. Le niveau des minéraux qui s’échangent alors est très élevé. C’est le premier aspect de cette manifestation.
Puis commence la bourse des minéraux proprement dite, à partir du mardi et mercredi. La qualité des objets est moindre. Depuis maintenant trois ans plusieurs très grands commerçants n’ont plus de stands. De même les grands collectionneurs se font plus rares. Sainte-Marie se recentre vers une minéralogie destinée aux collectionneurs plus modestes ainsi qu’au marché de gros: beaucoup de commerçants y viennent renouveler leur stock pour la saison estivale. L’ambiance est bon-enfant, assez festive et la fréquentation populaire.
Deux autres aspects sont les manifestations de lithothérapie et de gemmologie (pierres gemmes et précieuses) qui débutent plutôt le jeudi: la première des journées « pro » officielles.
Les journées « grand public » débutent le samedi matin.
Il n’y a pas que le commerce dans la vie
Dès les années 1980, Michel Schwab, l’ancien organisateur, avait donné une forte impulsion pour qu’il y ait des conférences et des expositions culturelles. Cette tradition s’est imposée et cette année encore, il y avait de nombreuses conférences plus ou moins sérieuses (celles sur la lithothérapie sont vraiment étranges) et de nombreux stands de diverses associations.
Parmi les stands les plus remarqués, on se doit de citer celui de Géopolis qui, malgré sa petite dimension, a été très fréquenté. Des cartes géologiques anciennes, des posters de minéraux ainsi que des bandeaux illustrés y étaient proposés. Les discussions allaient bon train, sur l’avenir des sciences de la Terre, en cette période où de graves décisions législatives sont en projet. Un apéritif était proposé le samedi à ses membres.
Il a aussi les microminéraux
L’Association française de Microminéralogie (AFM) occupait comme chaque année un grand stand où les animations et les loupes binoculaires étaient nombreuses. Chaque midi, se réunissaient les membres de cette sympathique association ainsi que les minéralogistes professionnels. N’oublions pas que l’AFM est à l’origine de la découverte récente de plus d’une dizaine d’espèces minérales. Ses publications sont remarquées et appréciées de beaucoup de scientifiques.
Les musées et les conservateurs
Sainte-Marie est de plus en plus fréquentée par les professionnels des musées qui ont déjà l’habitude de se réunir lors des foires de Tucson et de Munich. Cette année, Penny Williamson (université de Wollolong en Australie) a organisé la première réunion de la SMMP (Society of Mineral Museum Professionals). La fréquentation a été correcte et les conférences (en anglais!) passionnantes. Certains ont suggéré que l’on demande à ce qu’il y ait par la suite un local où les musées feraient leur promotion durant la foire. A bon entendeur, salut !
Exposition de prestige : Vins et Minéraux
L’exposition de prestige de cette année avait pour thème les pierres et les vins. Ce curieux appariement n’est pas nouveau car il avait été déjà réalisé par M G. C. Pardodi au Museum de Dijon. On peut aussi mentionner une exposition voisine qui avait apparié les minéraux aux insectes. Ne doutons pas que cette heureuse promotion des productions de nos terroirs sera poursuivie par des expositions associant, par exemple, minéraux et charcuterie, minéraux et fromages ou bien bonbons ou autres friandises.
Les bouteilles de vin côtoyaient les minéraux parmi lesquels quelques « best of » de l’école des Mines de Paris, du Muséum Nationale d’Histoire Naturelle , du musées des Confluences, de l’université de Strasbourg et de nombreuses collections privées.
Quelques explications minimalistes sur les causes de la couleur
Quelques joyaux du Muséum
Les nouveautés
Pour beaucoup, la principale nouveauté de la foire a été la publication, par les éditions du CNRS, de l’ouvrage « les minéraux, sciences et collections » rédigé par M Jean-Claude Boulliard. Ce livre est très novateur. Une première partie traite de questions posées par les profanes, néophytes, amateurs scientifiques et collectionneurs. Plusieurs points qui n’ont jamais été abordés auparavant sont traités. Ce sont, par exemple les traitements subis par les minéraux, leur cote, les causes des couleurs ou bien l’histoire des collections. La seconde partie décrit plus de 300 minéraux, avec leur caractéristiques, leur principaux gisements, leur conservation, leur traitement, désirabilité et cote. Ce livre signe manifestement un renouvellement dans le domaine de la minéralogie de collection. Le « JCB », car c’est ainsi qu’on le surnomme, a été très bien accueilli par les collectionneurs et professionnels.
Une note de lecture sera publié sur notre site.
Des calcédoines botryoïdales, très esthétiques et surprenantes, issues de Pasa’Bu ou Manakarra, dans l’île de Sulawasi-Célèbes (Indonésie) ont fait leur apparition. Ce matériel appelé localement « œufs de chauve-souris » est connu de longue date en Indonésie mais n’était pas jusqu’alors exporté.
Une belle récolte récente dans les Alpes - Les célèbres épidotes du Cornillon
Une (autre) belle récolte récente dans les Alpes - Les célèbres axinites des Rochers d’Armentier
Les améthyste marocaines
Les améthystes d’Adrar Tirecht Bou Oudi (province de Tata, région de Guelmim-Es Semara), découvertes récemment, ont été particulièrement abondantes. Elles se présentent en têtes hexagonales et plus rarement en prismes courts biterminés avec des zones colorées en sablier.
Le Pérou : le renouveau
Depuis quelques années on assiste au renouveau de la minéralogie du Pérou et incidemment aussi de celle de Bolivie. Il y avait cette année de très beaux lots de pyrite péruvienne.
La Chine : un tassement
Les commerçants chinois boudent la bourse de Sainte-Marie et sont de plus en plus rares. La production de ce pays ne semble pourtant par faiblir notoirement, ce que prouve certains lots vus chez d’autres commerçants.
Les pierres précieuses pour finir
La partie gemmologique, prend d’année en année de plus en plus d’importance mais est limitée par la place. La belle nouveauté de cette année, nous a été donnée par un lot de grenat magenta provenant du Mozambique.
Une courte conclusion
Sainte-Marie est toujours aussi active, joviale et populaire, cependant cette année, les nouveautés étaient peu nombreuses. Les propos de personnes bien informées laissent à penser que le marché parallèle, en hôtel, était beaucoup plus intéressant. Il est dommage que des commerçants de haut niveau ne prennent plus de stands et privent le public du plaisir de voir des minéraux remarquables. Dans un autre registre, la présence de nombreux conservateurs signe peut-être le début de nouvelles activités. Dans un local où les musées seraient représentés ?